La taxe Zucman : une fausse bonne idée pour le patrimoine (et l’immobilier en ligne de mire)

L’économiste Gabriel Zucman, proche de Thomas Piketty, propose une taxation mondiale des grandes fortunes à hauteur de 2 % par an. L’objectif ? Lutter contre les inégalités et financer la transition écologique. L’idée séduit sur le papier, mais dès qu’on la rapproche du monde réel — et notamment de l’immobilier — elle soulève des questions cruciales.

Qu’est-ce que la taxe Zucman ?

La taxe Zucman consiste à prélever chaque année environ 2 % du patrimoine net des ultra-riches (au-delà de 50 millions d’euros). Selon ses promoteurs, cette taxe pourrait générer plusieurs centaines de milliards par an à l’échelle mondiale (Le Monde).

Derrière l’élan égalitaire, un problème majeur se pose : toucher le capital productif et l’immobilier de manière récurrente peut produire l’effet inverse de celui recherché. Taxer la richesse, ce n’est pas seulement taxer un compte bancaire : c’est aussi fragiliser les bases patrimoniales qui financent l’économie réelle.

L’analogie avec l’immobilier : imaginez une taxe annuelle sur votre maison

Prenons une analogie simple : vous êtes propriétaire d’un appartement ou d’une maison. Chaque année, vous payez déjà la taxe foncière. Imaginez que l’État décide d’ajouter un impôt supplémentaire : 2 % de la valeur de votre bien, à régler chaque année.

Pour un logement de 400 000 €, cela représenterait 8 000 € d’impôt annuel, en plus de vos charges, crédits et taxes existantes. Même avec un revenu correct, cette ponction devient insoutenable.

Résultat : beaucoup de propriétaires devraient vendre, non pas par choix mais par obligation. Les prix chuteraient mécaniquement, faute d’acheteurs solvables. C’est exactement le risque que pose la taxe Zucman sur le capital financier et immobilier des grandes fortunes : forcer la vente d’actifs pour payer l’impôt, au détriment de la stabilité du marché.

Les effets économiques attendus

  • Baisse de l’investissement : les fortunes taxées auraient moins d’incitation à investir dans des entreprises ou des projets immobiliers à long terme.
  • Chute de la liquidité immobilière : si les détenteurs de patrimoine doivent vendre pour payer l’impôt, cela crée des ventes forcées et déstabilise les prix.
  • Évasion fiscale accrue : malgré les efforts de transparence, les capitaux trouveront toujours des juridictions attractives, comme l’a montré l’expérience de l’ISF en France (Les Échos).
  • Impact indirect sur la classe moyenne : si la taxe est d’abord ciblée sur les ultra-riches, elle pourrait s’étendre, comme l’ISF jadis, à des patrimoines plus modestes (notamment l’immobilier de famille en zone tendue).

Comparaisons internationales

L’idée de taxer la fortune n’est pas nouvelle. En France, l’Impôt de Solidarité sur la Fortune (ISF) a existé jusqu’en 2017, avant d’être transformé en IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière). Pourquoi ce changement ? Parce que l’ISF avait entraîné une fuite des capitaux, décourageant l’investissement productif (OCDE).

La Suisse conserve un impôt sur la fortune, mais à des taux bien plus bas (0,1–1 % en général), appliqués localement, et compensés par une stabilité fiscale et une sécurité juridique forte.

L’Espagne a réintroduit un impôt sur la fortune, mais limité et contesté, car il touche parfois des classes moyennes supérieures avec du patrimoine immobilier, sans pour autant rapporter beaucoup aux finances publiques.

Pourquoi la taxe Zucman pose problème

  1. Un rendement fiscal incertain : les projections théoriques de recettes (plusieurs centaines de milliards) ne tiennent pas compte de l’adaptation des contribuables. Avec l’ISF, la France a montré que les recettes réelles étaient faibles rapportées aux risques économiques.
  2. Un choc sur l’immobilier : en appliquant une taxation récurrente sur le capital immobilier, on risque une baisse généralisée des prix, avec perte de valeur pour les ménages et fragilisation du crédit bancaire.
  3. Un frein à l’investissement long terme : l’immobilier, comme le capital financier, a besoin de visibilité. Une taxe annuelle imprévisible détruit la confiance des investisseurs.
  4. Le risque de contagion : aujourd’hui ciblée sur les milliardaires, demain cette logique pourrait être appliquée aux « riches » propriétaires immobiliers dans les grandes métropoles (ex. : un couple ayant hérité d’une maison en Île-de-France).

Analogies concrètes avec l’immobilier

Pour mieux comprendre, faisons trois analogies simples :

  • Taxer le patrimoine comme on tond une pelouse : si on coupe trop court, on abîme les racines. L’immobilier fonctionne pareil : taxer la valeur plutôt que le revenu met en péril la pérennité.
  • Taxer le patrimoine comme un loyer fictif : c’est comme si vous deviez payer un loyer à l’État pour vivre dans votre propre maison. Une absurdité économique et sociale.
  • Taxer le patrimoine comme une fuite d’eau : au début, c’est supportable, mais à long terme, la fuite vide le réservoir et rend le système instable.

Vers une fiscalité plus intelligente

Plutôt qu’une taxe Zucman lourde et rigide, plusieurs pistes sont plus constructives :

  • Améliorer la taxation des flux (revenus, plus-values) plutôt que du stock.
  • Lutter contre l’évasion fiscale via la coopération internationale et l’échange automatique d’informations (OCDE).
  • Encourager l’investissement productif par des incitations (immobilier vert, rénovation énergétique, logement abordable).
  • Stabilité fiscale pour renforcer la confiance des ménages et investisseurs.

Conclusion : la prudence avant l’idéologie

La taxe Zucman part d’une bonne intention : réduire les inégalités. Mais appliquée sans nuance, elle risque de créer plus de dégâts que de solutions, en fragilisant le patrimoine immobilier et financier.

L’expérience française avec l’ISF l’a montré : les recettes sont faibles, la fuite des capitaux réelle, et l’investissement freiné. L’immobilier, colonne vertébrale du patrimoine des ménages, doit rester un actif protégé, encouragé, pas pénalisé.

En fiscalité comme en immobilier, la patience et la stabilité paient davantage que la précipitation.

Sources

⚠️ Cet article propose une analyse critique à visée éducative. Il ne constitue pas un conseil fiscal personnalisé.

Laisser un commentaire